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Je câline, tu câlines, nous nous câlinons

J’ai reçu mes deux doses de vaccin, la plupart de mon entourage en a au moins une, l’été revient. Je me sens enfin presque en sécurité, une sécurité relative certes, mais quasi commune pour moi. Dans mon corps, une simple grippe peut rapidement dégénérer en pneumonie. J’ai donc toujours fait attention aux microbes et bactéries, et maintenant que la vaste majorité de la société fait de même, je ne peux que m’en réjouir.

J’ai envie de prendre tout le monde dans mes bras, mes ami.es que je vois dans les parcs, que je croise dans la rue, ma famille que je n’ai pas vue depuis si longtemps. C’est dur d’avoir mes grands-parents de l’autres côté de la table pour souper et de na pas pouvoir leur faire de câlins. Juste un instant, juste une seconde.

De mon côté, je serais prête à reprendre une routine normale. Sauf que…

Sauf que dans mon cas, une routine normale, ça ne sortait déjà pas beaucoup et ça ne voyait pas grand monde. Ce n’était pas une grande passion d’aller dans les partys et rencontrer du nouveau monde. Je pourrais avoir ma routine « d’avant, » quelques ami.es à la maison, aller chez eux, faire des jeux de société. Des premières dates où on peut faire autre chose que d’aller se balader une heure ou deux, et où la deuxième est toujours identique à la première.

Je serais prête à reprendre une routine normale, à condition de choisir les gens avec qui je la partage. Les lieux, les moments, pouvoir évaluer les risques. À condition d’encore pouvoir assister à presque tout virtuellement, épargner le temps de transport, l’énergie du présentiel, mon anxiété sociale et ma peur des foules.

Au travail, par exemple, je suis loin d’être prête à ne serait-ce que penser à retirer mon masque. Avec le nombre de clients que je vois par jour, aussi gentils et polis que soit la plupart, il y a toujours des cas où j’hésiterais à m’approcher. Des stéréotypes, préjugés peut-être, mais aussi des clients avec qui j’ai dû me battre chaque semaine pour qu’ils portent correctement leur masque en entrant dans la pharmacie, puis au détour de chaque allée. Malheureusement, des égoïstes, il y en a partout.

En 2021, ère de la post-vérité, tout est vrai, même lorsqu’elle est prouvée fausse. Les conspirationnistes se démènent pieds et mains pour trouver l’exception qui confirme la règle et la transformer en généralité. Tout est relatif, tout dépend d’un point de vue, et rien n’est plus facile à tromper que quelques chiffres mal interprétés. Les apparences sont ce qu’il y a de plus important, bien que l’on sache tous qu’elles sont généralement truquées. On met un hashtag à la fin d’une publication, et notre part est faite pour la société. Pourquoi se compliquer la vie lorsque l’on peut faire simple ?

Je ne peux pas me fier sur les autres. Ma sécurité, bien qu’elle appartienne d’une certaine façon à l’espace public, passe d’abord et avant tout par moi-même. JE dois continuer de porter mon masque dans les espaces occupés, JE dois me laver les mains chaque fois que je ne peux éviter de toucher ce que des dizaines d’autres humains touchent, JE dois juger des habitudes des autres pour évaluer si je me sens à l’aise en leur présence, et JE choisis aussi désormais de demander aux gens avant d’enlever mon masque ou prendre dans mes bras des personnes que j’ai pourtant tenues tant de fois contre moi.

Je suis prête à revenir à une certaine normalité, mais je ne pense pas que notre société et nos habitudes « d’avant » devraient revenir. Pour moi, la normale ne sera plus jamais cette normale dans laquelle j’ai grandi. Comme communauté, et aussi bête que ça puisse paraître, pour la préservation de notre espèce, il est essentiel que nous fassions mieux en matière de santé. En prévention des maladies, du potentiel pandémique de chacune d’entre elles.

À tous ceux qui pensent qu’une pandémie mondiale est un évènement rarissime qui ne se reproduira plus jamais dans notre vie, j’ai de bien mauvaises nouvelles pour vous. Mais, je l’espère, la prochaine fois, nous serons mieux préparés et nous prendrons la science davantage au sérieux. Nous penserons aux autres, et nous éviterons la mort de millions de personnes.

La prochaine fois, parce qu’il y en aura une et parce qu’elle pourrait bien être moins loin qu’on ne le pense, je nous souhaite d’avoir appris, et surtout, de s’accorder la chance de faire toujours mieux.

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