Je suis anxiété

Je suis anxiété.

Cette semaine particulièrement, mais je dis ça chaque semaine, chaque mois, alors est-ce vraiment le cas ? Je fais environ une crise par jour, mais pas vraiment, ce sont de petites crises, enfin ça dépend, puisque j’ai connu pires celles-ci ne comptent pas. Je fais des cauchemars, je me réveille avec l’envie de me coller au creux de silhouettes absentes, je n’ai pas de réconfort, je lis. Mais je n’ai pas le temps.

J’ai besoin de me plonger dans les univers littéraires de tous les romans qui s’empilent sous mon bureau, sauf que je n’ai ni l’énergie ni la concentration de m’y attaquer. Les mêmes livres traînent dans mon sac, puis dans mon lit, font un tour dans le salon, reviennent dans mes poches de hoodies. Les coins de pages pliés sont nombreux, je n’arrive pas à enchaîner plus d’un chapitre à la fois. Sauf parfois.

Mon historique youtube est immense, mais la moitié de ces vidéos je ne les ai pas vues, je suis seulement incapable de m’endormir dans le silence. « Secret d’histoire » bonjour, merci d’avoir trouvé le parfait équilibre entre plate et divertissant. Pour cette même raison spotify est convaincu que j’adore les balados, mais je n’ouvre l’application que pour écouter en boucle les deux mêmes playlists. Night sky. Music for those days. Mes écouteurs entendent les mêmes albums depuis mes dix-sept ans.

J’ouvre netflix, j’ai pas envie, j’ouvre disney, j’ai pas envie, j’ouvre tou.tv, j’ai pas envie. Je me retourne dans mes draps et je recommence. C’est la millième story que je fais pour demander des recommandations de films que je ne regarderai pas. Je les ajoute seulement à une longue liste qui s’allonge, une parmi tant d’autres où je note toutes ces choses que je ne ferai jamais. Pourtant, mon horaire est rempli. J’ouvre les yeux. J’ai pas envie.

Il y a un sentiment au fond de moi, comme un poids lourd sur mon cœur, c’est tellement cliché, ça m’empêche de respirer. Quand je marche dans la rue, j’ai l’impression que je vais physiquement me briser. Pourtant, je souris, je rends mes travaux à temps, je ne call jamais malade à la pharmacie et je suis plus souvent en cours que les moments où je n’y suis pas. Conclusion : ça va. Ce n’est pas si mal.

J’ai de la misère à rappeler ma psy parce que j’ai peur de faire face à mes problèmes. Je n’étudie pour mes examens qu’à la dernière minute, voir pas du tout, mais je prends de belles notes. Je suis ici même si je rêve de ne pas y être. Alors que j’adore ma vie. J’adore mon quotidien, en théorie, l’idée que je m’en fais lorsque je fais fi de tous mes mauvais sentiments. J’aime les gens qui m’entourent et j’ai confiance que le temps fait bien les choses. Ce qui doit se passer se passera lorsque ça se passera, sans que j’aie à le brusquer.

Malgré cela, je continue de rêver à des billets d’avion, des billets d’autobus, à une location de voiture ou à une tente plantée sur le sable. Dans ma tête, il y a toi et moi, il y a des milliers de textes qui ne verront jamais le jour, des bibliothèques remplies des livres que j’aurai écris et un petit chat qui m’observe de haut. Au fond, c’est le seul qui n’a aucun souci.

Je suis anxieuse, mais j’arrive à vivre. Je suis dépressive, mais j’arrive à me lever. Mes TCAs font dire bonjour, mais je mange encore. Mes autres addictions semblent omniprésentes, mais je ne consomme plus. Mais, mais, mais. Le sens-tu, le syndrome de l’imposteur ? Parce que moi non, je le vois, je le sens, mais je ne le sens pas.

J’aimerais ça écrire de longues lettres d’amour, en pensant à une personne qui est un peu plus spéciale que les autres, en regardant par la fenêtre, en m’adressant aux feuilles qui tombent. Être le genre de fille qui écrit la poésie qui raconte ce qu’il y a de beau dans le monde, et pas ce qu’il y a de laid dans sa tête. J’aimerais cesser d’avoir des pensées intrusives dégoulinantes de sang, de mots et de violences qui n’appartiennent qu’au passé. J’aimerais juste vivre, comme tout le monde, ou même un peu plus, un peu plus fort, un peu plus vivante.

Je suis anxiété, et j’ai de la misère à me sortir de cette image. Que je sorte mes crayons ou mes pinceaux, il n’y a que ce sentiment qui en sort. Encore et encore, je répète des idées que je voudrais ne plus avoir. Je voudrais me souvenir de ce qui me plaisait lorsque je n’étais pas ensevelie sous toute cette anxiété. Lorsque je n’avais pas peur tout le temps.

Je suis anxiété.

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